Largage

Regain

J 6 et J 7

Le soleil s'est levé sur des journées claires aux frémissements de printemps.

Je mange presque normalement. Une simple soupe de légumes éclate en saveurs inégalées ! Nous cuisons des pommes, faisons des jus de fruits et carottes. Je me redresse. Je suis debout. Je marche !

 

Si le premier tour de la colline fut chancelant et enivrant à la fois, les suivants ont raffermi mes jambes. 

Le soleil danse dans les branches de chênes, les mousses s'enfoncent sous nos pas.

J 8 - Roquecor et les jardins de Pierrette

Nous nous sentons un peu pousser des ailes aux talons !

Lou nous emmène jusque dans le Tarn-et-Garonne voisin, sur des terroirs plus riches, plus amples.

Au détour d'un virage, entre les branches encore nues des chênes et érables, se dessinent des murailles juchées sur un promontoire de roches ocre pâle : Roquecor !

Roquecor de son nom ancien Ruppe Cornu : la Roche Pointue ou Roche Cornue, surplombant la rivière de la Petite Séoune.

Tout là-haut un faux "palazzo" florentin en toc et sa tour carrée et crénelée comme on savait le faire au XIXème pour en mettre plein les mirettes se donner l'illusion du luxe. Ici des maires quelque peu vaniteux et fats ont voulu dépasser en hauteur le clocher de l’église et se prendre pour un seigneur d'antan... Toujours cette nostalgie de la monarchie dont les élus de la République et souvent le Peuple lui-même ont du mal à se passer.

 

Fascination exercé par le pouvoir.... Si minime soit-il...

A gauche le Palazzo Vecchio des Médicis à Florence... à droite le "palazzo" Roquecor en Quercy Blanc
A gauche le Palazzo Vecchio des Médicis à Florence... à droite le "palazzo" Roquecor en Quercy Blanc

Le village s'est doté de rues et places pavées de pierres, et belles façades. Propre et chic. D'un café du Centre qui doit faire le plein en été.

Mais l'intérêt pour nous, se porte sur la partie moins visible parce que troglodytique, et sous le village !

 

La roche pointu, la Ruppe Cornu, sur laquelle est posé le village est creusée d'abris et grottes, dans ce que les habitants appellent "Lo Roc de Nobis" à cause d'une légende dont nous entendrons parler peu après, et où les années 50 ont hélas établi  leur décharge !

Sacrilège d'une génération qui avait oublié que le village, le vrai, fut construit dans cette Roque et occupé depuis l'âge de Bronze, par une poignée de Celte Vitriobriges, puis tout au long du Moyen-Age. Et sans doute plus tardivement encore.

Nous voici prévenus
Nous voici prévenus
Descente tranquille, à flanc de roche, sous le soleil !
Descente tranquille, à flanc de roche, sous le soleil !

Nous empruntons un des chemins qui descend le long de la falaise, tapissé de violettes déjà en fleurs, et découvrons que des petites mains entretiennent amoureusement, sentes, escaliers et jardinets jusque dans la vallée !

Roseaux, acanthes, aloès, figuiers de barbarie, petits point d'eau sous la roche habités par des grenouilles d'où fusent des papyrus

Cette roche blanche trouée de part en part, sèche et grenue recèle un trésor en son sein : de l'eau !

Beaucoup d'eau ! Même au sommet ! 

Abri troglodytique de Roquecor
Abri troglodytique de Roquecor

Et c'est là que nous l'avons rencontrée : celle dont les petites mains façonnent patiemment, depuis plus de dix ans, ces sentes, ces escaliers, ces jardinets suspendus, en petites corbeilles !

Celle qui a nettoyé, grottes par grottes, tous ces abris de leurs vielles boîtes de conserves rouillées et de leurs bouteilles vides abandonnées.

Celle qui tire sur les ronces et les arrache, une à une, taille les acanthes, emporte branches et feuilles pour les brûler plus loin.

Celle qui dédie ses dernières années à ce village ancien abandonné par les "modernes" qui lui tournent ostensiblement le dos.

D'ailleurs cette femme de 84 ans, Pierrette, fille du boulanger, devenue elle-même bouchère, pour finir "rentière" comme elle nous le dit en riant, n'a reçu aucun intérêt de l'ancien maire, Jacques Roudil, qui n'a même pas pris la peine, une seule fois de "descendre" voir le travail effectué patiemment par cette femme ! Pire, il l'aurait pris pour "folle" lorsqu'elle aurait pensé à montrer ces jardins lors des Journées du Patrimoine !

Pauvre homme....

 

Pierrette est "ses" jardins qui ne lui appartiennent que de cœur
Pierrette est "ses" jardins qui ne lui appartiennent que de cœur

Arrivés au pied de la Roque, ses trous et ses terrasses, nous faisons le tour de l’énorme rocher qui a donné son nom au lieu "Lo Roc des Nobis" : il s'est détaché de la falaise, en pleine noce médiévale écrasant tous les invités, et même la mariée. On raconte que seul le marié eut la vie sauve.

 

Il faut remonter maintenant.

J'ai présumé de mes forces.

L'ascension aura tôt fait de porter mon souffle au bord des lèvres. Mon cœur explose. 

Un lavoir d'eau transparente me permet une pause.

L'eau sort de cette roche comme le lait d'une nourrice !

Je pense à mon sein, nourricier, doux tiède et rond comme un bol de lait, et où le Crabe a fait son antre dure de caillasse.

Nous passons ensuite sous l'étonnante porte de la ville ancienne, entrelacs de poutres et piliers de bois, arche jetée sur la vallée.

La voiture nous ramènere sur notre colline.

Demain, il va pleuvoir.

 

Karkinos ! Crabe de mes rivières, toi qui t'es enfoui sous le sable chaud et doux de mon sein, toi qui a cru bon de détourner mes vaisseaux de lait qui y coulaient pour en faire ton repaire, dur comme la roche, Karkinos, mes petites mains vont t'arracher de là, comme mauvaise ronce, une à une, sans répit. Quand tu auras fini de me montrer tes territoires étranges, initiatiques mais malsains, tu devras quitter les lieux !


J 12  : Cleo et Betty

Tard dans la matinée, le facteur a apporté un colis de Chine.

Mes perruques commandées il y a une quinzaine de jours ! Je fais la grimace car les douanes taxent le colis et je ne m'y attendais pas ! La somme reste raisonnable (20 € dont une douzaine pour "frais").


Après le repas, j'ouvre le carton et découvre mes chevelures !

Essayage !

Avec mes petits cheveux et mon inexpérience, c'est un peu difficile encore de poser correctement ces "chapeaux" d'un style particulier. Ça glisse un peu, devant, derrière et par côté, il y a toujours quelques vrais cheveux qui dépassent, mais je suis étonnée par ma nouvelle tête ! Je me reconnais, bien sûr, mais, tellement différente !

Et voici Betty à gauche......                    Moi au centre et "au naturel" telle qu'au printemps dernier....                             Et Cléo à droite
Et voici Betty à gauche...... Moi au centre et "au naturel" telle qu'au printemps dernier.... Et Cléo à droite

Il y aura Betty, la petite auburn un brin coquine...

Et Cléo, parce que... Cléopatre dans la coupe... Je ne vais pas chercher plus loin pour ce carré tombant.

Je me photographie sous tous les angles et "ris de me voir si belle en ce miroir" !

Étrange sensation du "Je est une autre" !

 

J'en conclus, à la vue des résultats peu convaincants de mes selfies, qu'il me faudra refaire des essayages, et des photos, dès que mes vrais cheveux, blancs, auront déserté mon crâne (ce qui ne saurait tarder maintenant) et dehors en plein soleil !

Mais la pluie tombe depuis deux jours....

J 13 .... Chute annoncée

La pluie crépite sur ma lucarne.

Mon crâne crame ! L'impression qu'il est en train d'être poncé par une toile émeris ! 

Les premiers cheveux se détachent comme des feuilles au début de l'automne !


Écrire commentaire

Commentaires: 0